Le multilinguisme luxembourgeois.
L’histoire du Luxembourgeois dans ce brouillamini est bien particulière. Tous les interlocuteurs auxquels j’ai raconté sommairement l’histoire de notre multilinguisme étaient étonnés, surpris, et parfois même admiratifs devant l’ingéniosité d’un peuple qui avait su se tailler une place dans les enceintes internationales, tout en gardant une authenticité linguistique unique en Europe.
Déjà en 1843, 4 années après son indépendance, le pays avait réglé par la loi sa situation linguistique, statuant que la langue officielle du nouveau pays est le Français et la langue de communication l’Allemand. L’idiome parlé par les populations rurales, le luxembourgeois, ne fut pas mentionné à l’époque. Le pragmatisme du législateur tenait compte du fait que les fonctionnaires étaient de langue française et la législation basée sur le Code Napoléon.
Lors de l’indépendance, qui lui fût accordé au Congrès de Vienne de 1814, l’ancien Duché de Luxembourg est devenu un Grand Duché, rattaché à la maison souveraine des Pays-Bas. Ceci, avec le transfert de territoires aux voisins allemands, français et belges. En devenant « Grand » duché, l’ancien Duché de Luxembourg a perdu une bonne partie de ses territoires !
Ainsi se faisait le partage au XIXe siècle. La création de ce pays-tampon, entre les grands belligérants. Le nouvel état n’était pas doté de forces militaires, et sa neutralité s’est maintenue jusqu’après la deuxième guerre mondiale, après l’essai des forces Nazi de récupérer les territoires avec l’occupation du Luxembourg en 1940.
Le bilinguisme s’est développé, l’apprentissage de la lecture et de l’écriture à l’école primaire s’est fait en allemand, auquel s’est ajouté très tôt le Français. Cet apprentissage précoce de deux langues étrangères s’est révélé bénéfique.
Avec l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale l’interdiction d’utiliser le Luxembourgeois, et l’essai d’allemaniser la population, la résistance des citoyens s’est organisée. Un référendum des forces occupantes sur l’appartenance ethnique et linguistique a été le début d’un combat de David contre Goliath : l’enrôlement de force des jeunes Luxembourgeois dans la Wehrmacht était la répression terrible contre la volonté d’un petit peuple de garder son appartenance culturelle et linguistique.
Plus tard seulement, en 1984, le Luxembourgeois est devenu la langue nationale, le français est resté la langue officielle, et les petits citoyens apprennent toujours à lire et à écrire en allemand…..ce qui pour certains enfants d’immigrés, notamment portugais et slaves, devient la quadrature du cercle.
L’histoire est entachée de souffrance, la deuxième guerre mondiale a fait du Luxembourg un pays meurtri qui a perdu des générations dans les camps et sur les champs de bataille.
L’adhésion à la communauté de la Ceca, la Haute Autorité du Charbon et de l’Acier, était un acte qui coulait de source, de même que l’adhésion à l’OTAN. L’adhésion au Benelux avait déjà rendu familiers les milieux politiques grand ducaux avec la coopération internationale. Ils étaient fiers de pouvoir parfois être les traducteurs pour les Français et les Allemands.Ils avaient surtout compris que la langue, ce n’est pas seulement l’expression mais aussi la culture.
Ainsi l’Allemand, c’est aussi Goethe et le Français c’est Voltaire. La compréhension du problème linguistique va bien au-delà de simples problèmes de traduction. C’est l’âme des peuples qui se traduit dans sa langue, la littérature et les arts.
Le luxembourgeois n’a jusqu’à ce jour pas (encore) été promue langue de travail européenne. Donc pas de traductions en luxembourgeois, les six députés sont bien obligés de parler une langue qui n’est pas leur langue maternelle, ceci ne les a pas empêchés de prendre la parole et de s’impliquer dans les travaux des commissions dans lesquelles ils étaient admis.