But très ambitieux, trop peut-être en considérant l’état d’esprit et la volonté politique dans les Etats membres. A tel point qu’à la mi-parcours, un rapport élaboré par l’ancien premier ministre des Pays Bas Wim Kok a fait un état des lieux. Connu pour l’essentiel pour ses chapitres négatifs, ce rapport a aussi fait état de 2 pays qui ont d’ores et déjà atteint les critères de Lisbonne, à savoir un investissement de 2% du PIB dans la recherche du secteur privé et plus de 1% pour le secteur public. Une analyse présentée au conseil des ministres de la compétitivité en juillet 2004 mentionnait que la raison du succès de la Finlande et des Pays Bas – car c’est de ces deux pays qu’il s’agit – est qu’ils avaient réussi à relancer la recherche par l’activité accrue des PME et notamment par la coopération entre ces dernières et les Universités.
Dans son discours qualifié de « programmatique » le ministre de l’économie ne prononce pas le mot université. Or il y aurait beaucoup de choses à dire sur le sujet des universités et de l’avancement de la recherche en Europe! Car dès le départ, la stratégie de Lisbonne, en se basant sur la comparaison avec les Etats-Unis, néglige le fait qu’en Europe il n’existe pas le même type d’universités et que de ce fait la recherche a depuis de longues années été sous-financée, sous-estimée, ce qui a par ailleurs fait partir un grand nombre de chercheurs. L’Europe n’est-elle pas en train de se bercer de l’illusion qu’il suffit d’une déclaration d’intention de ses dirigeants pour rattraper les retards accumulés ces 30 dernières années dans des domaines de recherche fondamentale porteurs d’avenir ?
Depuis la création des programmes-cadres européens de recherche et de développement, en 1984, le lien entre recherche et développement a été à la base de la philosophie du système de soutien européen à la recherche. Or depuis peu la conscience que sans recherche fondamentale l’innovation se fait attendre gagne du terrain. Le 7ème programme cadre en est un timide début. La création de l’Université du Luxembourg devrait donc à plus d’un titre servir l’économie de notre pays, à condition cependant qu’elle soit perçue comme partie intégrante d’un nouveau souffle que nous devons trouver, après la sidérurgie, le secteur financier, et les satellites.
L’exemple d’autres petits pays qui ont réussi à relancer leur économie pourrait par ailleurs nous guider utilement. La Finlande a misé au bon moment sur les technologies de pointe, mais elle a investi une grande partie de ses ressources dans ce seul secteur. L’éparpillement serait la pire des tentations pour notre recherche : plaire à tout le monde n’est pas la bonne méthode.
Et si le ministre de l’économie nous invite à mettre les baskets pour courir de l’avant, il devra encore indiquer la piste à prendre…