Le sentiment d’impuissance sans cesse apparent face à l’immensité de la tâche est un peu tempéré au vu de ce geste des grands. Encore que l’aide au développement est une entreprise de longue haleine et l’Afrique un continent meurtri. L’UE est le premier investisseur et nombre de pays européens, Danemark, Suède, Luxembourg, ont atteint le « millenium goal », le don de 1% de leur richesse pour les pays pauvres. Toutefois la politique de l’aumône est à son terme et la politique d’aide au développement régie par le proverbe chinois : au lieu de donner au pauvre un poisson, apprends lui à pêcher.
En convaincant les Etats-Unis de joindre l’action commune Tony Blair a redoré son blason comme chef d’Etat d’envergure. Cependant l’action n’est peut-être pas aussi désintéressée qu’il n’y paraît. Et la réponse des pays africains a relevé leur souhait d’accès aux marchés européens avec leurs produits.
On a bon souvenir en Europe de la guerre des bananes – façon de décrire l’exclusion des marchés européens de produits non désirés, car concurrentiels, par une réglementation jugée excessive par les consommateurs. Il y aurait à mentionner le problème du sucre, dont la production est subventionnée en Europe et ainsi l’exclusion d’autres producteurs garantie!
A ce propos, le Brésil est en train de lancer sur le marché du carburant produit à base de sucre, ce qui représente de nouveaux débouchés pour un produit non admis sur le marché européen. En attendant, l’UE n’arrive pas à un accord sur son budget à cause du refus de certains de réformer encore la politique agricole.
Le souhait de M. Blair est en opposition flagrante avec celui de M. Chirac, et finalement les deux fonctionnent dans la même logique, à savoir qu’un « tiens » vaut mieux que deux « tu l’auras ». Pour M. Blair, l’intégralité de son chèque, pour M. Chirac, la PAC intacte. Et comment notre pauvre premier ministre arrivera-t-il à trouver une sortie honorable à ces marchandages?
Quant à Tony Blair, sera-t-il le fossoyeur de l’Europe après son opération de sauvetage pour l’Afrique ? Faut-il s’étonner qu’au vu de ce piètre spectacle les citoyens n’aient plus envie de cette Europe là?