Drôle de façon de s’imaginer qu’un commissaire prévu pour les domaines de la justice, de la liberté et de la sécurité, puisse distribuer les deniers publics sans autre contrôle à qui il voudrait.
La Commission est entourée de 24000 fonctionnaires, plus ou moins 1000 fonctionnaires par commissaire. 23 directions générales pour les domaines principaux travaillent avec des spécialistes hautement qualifiés, les agences spécialisées, les services, les programmes et toute la structure compliquée de la bureaucratie bruxelloise.
A vrai dire, les commissaires sont bien épaulés. Si bien que, dans tout le bruit fait autour de Rocco, il est passé presque inaperçu que l’un des commissaires désignés a été sévèrement mis en cause pour manque de compétence. Ainsi, l’opération de relations publiques des auditions, qui devait donner un lustre à la nouvelle commission, et une importance aux membres du Parlement européen, n’a pas vraiment réussi à faire oublier les tergiversations autour de son président. En fait l’opération a débouché sur une affrontement idéologique, mêlé de ressentiments personnels, excessifs et par conséquent insignifiants.
Et à force de commenter la phrase de Rocco Buttiglione, est passé presque inaperçu un autre désigné du nom de Kovács. Contesté parce qu’il ne serait pas à la hauteur des dossiers, ayant mal ou pas répondu aux questions, plusieurs commissions se sont exprimées contre sa désignation. Resté largement en dessous de la publicité faite à Buttiglione, Kovács peut revendiquer un atout : il est de gauche. Et une excuse : il est nouveau dans l’enceinte européenne.
En fin de compte, comme les autres commissions qui la précédaient, celle-ci finira bien par se mettre en route, car le travail qui l’attend est de taille. Et les équipes qui entourent les commissaires doivent vraiment être excellentes car, figurez-vous, il y a deux mois, le commissaire à la Recherche – élu au Parlement européen – a dû faire place à un autre commissaire. Pendant deux mois, le commissaire prévu pour le développement et l’aide humanitaire était affecté à la recherche, et pendant ce temps, le dossier épineux du réacteur nucléaire ITER était à l’ordre du jour au Conseil des ministres. Les commissaires seraient-ils interchangeables, vu que la plupart du temps ce sont les gouvernements qui, au Conseil des ministres, bloquent ou font avancer les choses ? Jusqu’à nouvel ordre, car la Constitution nous approchera un peu d’une vraie Commission apte à gouverner l’Europe et non 25 pays différents. Le chemin est long, et les progrès sont lents.
Le Parlement considère que désormais le manque de compétence, et le manque de transparence en ce qui concerne l’indépendance des futurs commissaires, constitue aussi une faute grave. Oral non réussi, pourrait-on dire. Et certains gouvernements ne se verront pas délestés d’un tel ou d’une telle…