Ce soir Erna Hennicot-Schoepges sera l’invitée des mardis de la philo. Elle abordera notamment ses trois vies : la famille, la musique et la philosophie, et de la manière dont elle a réussi a les concilier.
Conscience personnelle
Conscience de ce que nous sommes devenus par un passé – composé de l’héritage de parents, famille – environnement. Famille modeste, ouvrier d’usine à Dudelange, fermiers à Troisvierges, mon père et la famille de ma mère ont forgé ce passé, avec l’arrière-fond de la sidérurgie, de ces grands patrons qui ont ancrée ma famille dans ce milieu empreint de simplicité, de solidarité, de conscience que le travail c’est important que c’est la dignité qui fait transgresser le manque d’éducation, qui n’est pas synonyme de manque de culture.
Un premier pilier qui a façonné ma façon de comprendre la culture a été l’apprentissage du besoin de culture, présent à l’époque dans ces milieux ouvriers, non exprimé, mais bien présent. Et j’ai observé que ce n’est pas la culture au rabais, mais au contraire l’admiration, le respect des grands, sans connaître les noms, mais appréciant la grandeur de leurs œuvres qui était présente. Ainsi à l’âge de 5 ans j’ai appris le piano, acheter un instrument payer les leçons, quel effort, mais quelle promotion pour ma famille de me voir décrocher des résultats excellents et à l’âge de 14 ans prête à être admise au Conservatoire de Bruxelles.
Il m’en est resté une conscience de dette envers mes parents, ma sœur, mon frère surtout qui m’a donné le goût à l’engagement politique.
En fait j’ai vécu 3 vies en parallèle, musique, famille, politique procédant par priorités, instant par instant, comme avec des tiroirs que j’arriverais à ouvrir et fermer au besoin.
De mon enfance il m’est aussi resté l’empreinte du milieu ouvrier, de la timidité à l’égard des bourgeois. Le Sud et le Centre c’était un autre langage, une autre perception, le franc-parler.
Marquée par mon éducation catholique, un fil conducteur traçait mon chemin, honnêteté, vérité, sincérité, le jeu de la communication ce n’était pas mon fort. En fait je n’avais pas les prérequis d’une carrière politique, ni la témérité, ni l’aplomb, et surtout pas le talent de jouer, de faire semblant. Naïve, en plus j’y croyais! Et en fait j’ai survécu aux pressions de toutes sortes. Mon engagement pour la chose publique a débuté assez tôt, de par l’intérêt que je partageais avec mon frère pour son activité syndicale ou locale.
La mauvaise conscience d’en pas faire assez m’est restée de la pression à laquelle j’étais soumise par le cumul de mes études musicales à Bruxelles en parallèle avec le lycée à Esch/Alzette pas de loisirs. Elle m’est restée, cette mauvaise conscience, le déchirement intérieur quand plus tard alors que j’étais jeune mère de 3 enfants quand l’appel à la politique exigeant à une présence assidue et irrégulière.
La politique c’est la chance extraordinaire de pouvoir changer les choses. Deux domaines représentaient ma première motivation, à pied d’égalité je dirais. Femme, mère de famille travaillant à plein temps – le mi-temps n’était pas autorisé à l’époque, tout était à faire pour l’égalité de traitement- musicienne, blessée plus d’une fois par les commentaires dénigrants de ceux qui considéraient le métier comme une occupation mineure. Les musiciens sont ceux qui jouent, voilà des choses qu’il fallait changer.
Et me voilà sur la piste avec la mauvaise conscience d’imposer un rythme de vie irrégulier à ma famille, et la bonne conscience de m’engager pour une noble cause, pour les autres pour faire changer les choses pour elles et pour eux. Le consentement désintéressé de mon mari m’a permis de foncer, il m’a épaulé, sans jamais m’influencer, équilibrant mes connaissances par son expérience d’ingénieur chimiste du secteur privé. Mais voyez-vous encore ma vie personnelle se mêle à ma démarche en politique. Peut-on faire abstraction de l’un ou de l’autre volet, prôner ce qu’on ne fait pas soi-même, tenir un double langage?
Le conflit entre être et paraître se pose en politique dans ce milieu où tout le monde connaît tout le monde.
Mais c’est probablement la perception dépassée d’un autre âge, aujourd’hui la politique ne se fait plus comme autrefois, la conscience personnelle joue-t-elle, encore ce rôle, car si la conviction politique ne rime pas avec la conscience (Gewissen) elle peut très bien s’accorder avec la façon d’être, (Bewusstsein) de se mouvoir en accord avec les collègues, la majorité, car la position minoritaire en politique est toujours difficile à soutenir tous partis politiques confondus.
Je ne suis pas philosophe, il se peut que mon interprétation des termes ne soit pas correcte. En outre, l’expérience personnelle que je ramène de Bruxelles ou de Strasbourg est entachée des rouages de la politique européenne qui est le résultat de compromis, de la prédominance du concept de consensus et de l’influence, inacceptable pour moi des nombreux lobbyistes qui circulent dans les couloirs de Bruxelles.
Et voilà une question de conscience personnelle, car pour tenir tête à un lobbysme professionnel, il faut être bien organisé, et se prémunir de connaissances, et d’expertises qui permettent de dévoiler les contrevérités, avec lesquelles les débats sont menés.
Mais voilà la question fondamentale quels sont les chemins qu’engagera l’UE la démocratie et la politique en général.
Sommes-nous en route vers la loi faite par l’audimètre, les sondages, les quotas, où le jeu démocratique se résumera à voter pour les majorités des bien aimés par l’image qu’ils se sont-forgés eux-mêmes et pour le reste quel sera le rôle des partis politiques.
Peut-on donner une définition de la conscience professionnelle de la politique, qui est exercée à plein temps, comme un vrai métier, alors que je l’ai plutôt considérée comme une fonction temporaire à laquelle on accède par le tri de l’élection. Gouverner c’est choisir, la politique définie comme l’art de gouverner en appelle à la conscience professionnelle de ceux qui exercent ce ‘métier’.
L’exercent-ils à cette seule fin ou plutôt dans le but de plaire au plus grand nombre ? Bientôt je ne serai plus ni député, ni ministre – le titre ne se garde pas au Luxembourg, je serai encore présidente d’associations.
J’ai une satisfaction espiègle d’avoir réussi 2 choses, mon prévues ni dans le programme de mon parti ni dans le programme de la coalition gouvernemental, l’éducation précoce et l’université.
Pour le reste j’ai la conscience tranquille, l’état a gagné tous les procès de Magnys dorés.
L’investissement dans les infrastructures culturelles a aussi crée la demande, et l’occasion pour ceux qui ne peuvent se permettre de parcourir le monde pour voir et entendre les grands. On m’a répondu une fois en haut-lien que la culture c’est 1 % de l’électorat – ce que je conteste. C’est l’âme des peuples dont il faut avoir conscience.