Le passage de la flamme olympique à Paris a été un événement non sportif. La démonstration de force de milliers de CRS, était-ce le meilleur moyen pour empêcher la violence et les bras de fer entre les manifestants et les forces de l’ordre? Et dans la foulée du chaos, c’est même un des dirigeants chinois qui a lui-même éteint la flamme – à la stupéfaction de l’athlète français qui devait prendre la relève! Même la gente politique s’est présentée avec le drapeau tibétain. Avec l’argument que rien n’empêchera le droit à la liberté d’expression.
D’aucuns ont calculé le bilan environnemental des parcours de la flamme olympique, bien sûr sans compter l’intervention des force de l’ordre… car qui l’eût cru que l’opinion publique allait se mobiliser à tel point pour un petit pays théocratique, après tant d’années déjà?
Mobilisation qui n’est pas mentionnée en Chine, car à part la mention de quelques manifestants « professionnels », le passage de la flamme a été accompagné de vues de la tour Eiffel et d’autres monuments parisiens. Et si la presse n’en parle pas, qui pourrait faire passer le message aux Tibétains, et aux défenseurs des droits de l’homme, qu’en Europe ils sont soutenus dans leur lutte pour la liberté! Et qui en parlera aux autorités chinoises si les grands chefs de la diplomatie sont absents de ce rendez-vous avec l’histoire? Ira, n’ira pas? C’est la question que se posent maints dirigeants politiques. Trop tôt pour y répondre, pas ministre des sports, on verra en temps utile… les réponses des chefs d’état sont mitigées. Seule la chancelière allemande a dit qu’elle n’y sera pas. Elle qui a reçu le Dalaï-lama, envers et contre toutes les remarques hargneuses de l’opposition.
Le sport non politique, le serait-il quand-même par le biais des « à côtés » diplomatiques! Et l’UE naïve, n’a-t-elle pas même envisagé de faire passer le message du dialogue interculturel lors des grands événements sportifs, comme les J.O.?
Ne pas mélanger les enjeux, la décision d’aller en Chine aurait déjà été prise dans l’esprit d’ouverture, l’appel au respect des droits de l’homme étant sous-jacent à la décision d’y aller… Les temps de la guerre froide sont bien terminés et la Chine est devenue notre concurrent économique, un client important pour les entreprises, un allié possible pour les politiques environnementales!? La belle tradition de la flamme, portée jadis par les athlètes à pied de l’Olympe au lieu des jeux, a été reprise et adaptée à la logistique du monde globalisé. Une autre tradition de la Grèce Antique liée aux J.O. n’a pas été reprise: c’est la trêve pour tous les conflits en cours. Les jeux symbolisaient la période de paix, en appelaient à toutes les parties d’arrêter la violence. La violation de ce principe était considérée comme une offense à l’esprit pacificateur des jeux où les vainqueurs respectaient les vaincus. Le moment de répit permettait la réflexion et la médiation; c’était une culture volontariste de la résolution pacifique des conflits de la non-violence organisée par le biais d’un événement sportif.
Cet esprit-là n’a pas été transmis, du moins, on n’en a plus conscience! Une période exceptionnelle qui ferait cesser pendant un temps déterminé toutes les opérations meurtrières partout au monde serait importante. Le Tibet est en fait le pic d’un iceberg, une culture en train de disparaître, une religion réprimée par le pouvoir – symbole de déviations de notre époque.
10/04/2008
Le Jeudi