Macha Meril, femme écrivain célèbre, vient de faire part publiquement de son regret de n’avoir pas eu d’enfant. Son témoignage courageux et émouvant à la fois, ouvre la brèche sur un débat qui est pour la plupart du temps biaisé de malentendus. Déjà, elle prévoit dans la présentation de sa nouvelle publication – « Un jour, je suis morte » – la réprobation des féministes qui lui rétorqueront qu’une femme ne s’épanouit pas seulement par l’enfant qu’elle a porté dans son ventre, mais qu’il y a bien autre chose…
Reconnaître à la soixantaine d’être veuve de soi-même du fait de la stérilité, c’est aussi enfoncer bien des tabous du discours femme et enfant qui n’a pas encore trouvé son équilibre.
L’aveu d’avoir avorté à seize ans, d’avoir ensuite subit plusieurs fausses-couches et eu recours à la fertilisation in vitro – sans résultat – ouvre des chantiers en friche et suscite réflexions et commentaires.
Un débat mal agencé d’ailleurs, car les femmes (féministes) en ont voulu porter toute la responsabilité toutes seules. Mon ventre m’appartient, c’était le cri de révolte qui était synonyme de liberté sexuelle, d’affranchissement de plusieurs millénaires de « soumission et d’oppression »… Et il n’est pas question de remettre en cause la liberté acquise par la femme de choisir et de décider le moment propice pour l’accueil de l’enfant. Encore que liberté, c’est aussi responsabilité. En l’assumant toute seule, la femme l’est restée – seule – jusqu’à ce jour. La prise en charge des responsabilités pour la garde d’enfants est classée automatiquement dans les tâches de la femme. Du moins, dans certaines prises de position politiques, il semble tout donné que l’enfant en bas âge a d’abord et avant tout une mère. Les pères éclipsés ne correspondent pas non plus à la situation réelle. Nombreux sont les hommes qui s’occupent avec beaucoup de tendresse de leur progéniture, si petite soit-elle. Il est vrai que la revendication publique de leurs droits se fait plutôt seulement en cas de conflit pour le partage de la garde, des allocations, voire l’imposition.
Quant au débat sur la stérilité, sous-jacente aux regrets de Macha Meril, c’est un débat évincé par les décideurs. Il n’est pas du domaine de la politique familiale et démographique mais les statistiques sont alarmantes.
Un couple sur dix devrait avoir recours à la fertilisation in vitro. Liée directement à des problèmes environnementaux, notamment à la présence de perturbateurs endocriniens et de substances mutagènes par l’utilisation de certaines substances chimiques ou de pesticides, la légèreté, voire l’insouciance avec lesquels leur utilisation n’est pas mise en relation directe avec le problème de la stérilité laisse pantois.
Un grave problème de société, que l’Union européenne a traité dans les directives sur REACH (règlement sur l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et les restrictions des substances chimiques) et celles sur les pesticides en cours au Parlement.
L’enfant considéré comme entrave à la carrière est certainement la plus négative des expressions du souhait d’égalité exprimé par les femmes. Elles sont nombreuses à avoir vécu le contraire, a avoir en couple responsable accueilli l’enfant comme une richesse à partager à deux, tant pour les charges que pour le plaisir et la fierté. Elles sont nombreuses à ne pas s’étaler en public sur la façon dont elles ont organisé leur temps de travail.
Toutes aussi nombreuses sont celles qui souffrent en silence de n’avoir pu donner naissance à un enfant. Et d’ailleurs aussi les hommes en souffrent, depuis que la science a révélé que la stérilité n’est pas seulement l’affaire des femmes…
Mais ce sera un autre débat.
06/03/2008
Le Jeudi