Un débat mal engagé lorsqu’il n’est plus empreint de retenue et de respect, mais devenu l’enjeu de politique politicienne!
Or dans ce cas il n’y aura pas de vainqueur, mais seulement des vaincus. Car soudain la mort est devenue banale, ce n’est plus comme disait l’Abbé Pierre l’une des deux grandes choses à ne pas rater dans la vie: « l’amour et la mort, car celle-ci transcende l’autre. » Et quand la tribune publique s’empare du débat les déraillements ne se font pas attendre. Le respect de l’autre et de son opinion vaut aussi pour l’archevêque de l’église catholique, même si sa prise de position ne rejoint pas le postulat du député vert – qui d’ailleurs n’a pas suivi l’exemple du véritable initiateur du plaidoyer pour le testament biologique. Le Dr. Henri Clees, militant pour la cause il y a une décennie, en parlait autrement, avec la sensibilité de toute son expérience de médecin.
De quel droit semer la zizanie parmi les nombreux malades d’un cancer, ou ceux qui souffrent de la maladie d’Alzheimer avec les annonces fanfaronneuses qu’un malade d’Alzheimer s’est suicidé et qu’une malade défigurée par le cancer en veut à son médecin de ne pas l’aider à mourir? Quel respect a-t-on pour les nombreuses personnes qui redoutent la démence mentale, qui ne voudraient pas infliger ce calvaire à leurs proches! Serait-ce une nouvelle suggestive, grossie par les effets de pub d’une société qui s’arroge le droit de jugement sur ce que veut dire la dignité en cas de maladie? N’a-t-on pas entamé une lutte mondiale contre la lèpre, défigurant aussi les malades, Raoul Folleraux, héros du 20e siècle, aurait-il engagé son combat pour sortir les lépreux de leurs oubliettes, s’il n’avait pas cru en la dignité de l’être humain, même défiguré?
Le voyeurisme a gagné la scène pour l’événement le plus intime et le plus secret de la nature humaine. Et dire que Dignitas, société suisse qui pratique le suicide assisté, aurait une nouvelle technique selon les informations lues dans la presse: un ballon à gaz enfilé sur la tête du patient! Après dix minutes il était mort.
Quant au fond le débat public, ne cache-t-il pas un malaise profond entre le malade, sa famille, et son médecin? Est-on mis en confiance aux urgences où les patients sont souvent soumis à des heures d’attentes, alors qu’il ne leur reste que peu de temps à vivre, et leurs proches laissés dans l’ignorance totale sur ce qui se passe? Ceux qui parlent dans ce débat, devraient bien faire attention que leurs paroles concordent avec leurs actes.
Le suicide est la cause la plus fréquente des décès au Grand-Duché de Luxembourg.
Même sans assistance médicale Stephan Zweig s’est suicidé avec son épouse dans son exile. Dignement, avec une lettre d’adieu! Nombreux sont ceux qui l’ont fait, sans attendre une législation spécifique. Doit-on mêler le médecin à cette décision? Et légiférer pour que les hommes et les femmes en blanc soient à l’abri de la poursuite judiciaire? N’est-ce pas ouvrir aussi l’autre brèche: les poursuites pour manquements? Le vrai débat est aussi celui de la confiance. Jamais la loi ne saura régler tous les cas. Entre la vie et la mort se faufile la technique médicale, les instruments sophistiqués qui maintiennent des fonctions en état de marche, peu intensifs en soins du point de vue du besoin en personnel paramédical. Habituée à fractionner le corps en tranches, quel sera le verdict de l’équipe médical au cas où un seul organe vital est déficient, établira-t-on des hiérarchies d’organes selon laquelle la décision sera prise?
Le patient sera toujours entre les mains de son médecin, de l’équipe qui l’entoure et de sa famille. La tournure populiste du débat ne rétablira cette confiance, et non plus un éclaircissement aux doutes de quelques partis politiques.
Mais que, par respect de tous ceux qui souffrent, on pèse ses mots.
Le Jeudi 27.03.2008