Le « crash » à la bourse du lundi noir, devrait-il ramener à la raison les grands spéculateurs, marchands de l’argent facile? Ces cours mystérieux font des escapades lorsqu’il y a fermeture à New York ou Tokyo, s’envolaient avec l’annonce du président américain de la guerre en Irak, cours en hausse, lorsqu’il y a l’annonce qu’une grande entreprise licencie des milliers de salariés, lorsque quelque chercheur impatient fanfaronne sa « découverte » d’une nouvelle technique, les cours de l’industrie pharmaceutique qui la finance sont à la hausse… quitte à retomber par après lorsque dégonfle la nouvelle à sa valeur réelle. Les exemples de ce genre sont nombreux: les procès en médecine qui obligent « big pharma » à retirer du marché l’un ou l’autre médicament sont réputés pour leurs effets négatifs sur les cours en bourse. La majorité des citoyens n’y attache pas une grande importance. Les spéculateurs, eux, suivent les évolutions de la recherche et du développement économique. S’ils se sont trompés, tant pis, le gain parfois exorbitant vaut bien un risque!
Cette fois-ci, les grosses affaires ont attiré même les spécialistes dans le guet-apens. On veut nous faire croire que c’est à cause de l’effondrement du marché immobilier aux Etats-Unis que de grandes banques européennes se sont effondrées. Pourquoi n’auraient-ils pas placé en Europe, même à moindre recette? N’était-ce pas un des arguments pour défendre jadis le secret fiscal et le maintien de places « off shore » dans l’UE, pour éviter la fuite des capitaux en dehors de l’Europe? L’investissement dans l’immobilier a d’ailleurs été pour le citoyen lambda synonyme de solide. Et voilà que se dévoile la plus grande désillusion de ce nouveau siècle: sans contrainte apparente, par pure cupidité, pour le bien de leurs clients, diront-ils, l’expatriement de l’argent (des) européen(s) est devenu un boomerang dangereux pour l’économie européenne. Et si l’on appelle aux Etats membres à initier les mêmes programmes d’aide que vient de lancer le président américain, leur permettra-t-on aussi de s’endetter comme celui-ci l’a fait? Y aura-t-il à côté du faible dollar un euro à égale faiblesse? Pourquoi cet ajustement sur les politiques des USA, n’y a-t-il pas eu comme principe fondateur de l’UE l’indépendance vis-à-vis des autres continents et notamment de la politique américaine? Ne serait-il pas temps de remettre en cause tous ces effets pervers de la globalisation, de redevenir une Europe forte de ses convictions, fière de ses acquis et prudente dans ses démarches?
Les banquiers n’ont-ils été que des marchands d’illusions, frileux lorsqu’il s’agit de débourser quelques centimes pour la culture – (qui ne rapporte pas) et grands joueurs lorsqu’il s’agit de se plier aux exigences des grands capitaux!
Une confiance de plus qui s’est ébranlée, car le citoyen qui confie mois par mois, de petites sommes à son banquier, pour un maigre revenu, sur lequel il doit encore payer des impôts – transparence oblige – que pensera-t-il lorsqu’on veut lui faire placer son argent en actions pour faire fonctionner des entreprises?
La confiance en les dirigeants du monde de l’économie et des finances est ébranlée, alors que la politique connaît déjà assez d’inquiétudes et d’insécurité. Après que de grands dirigeants d’entreprise ont été dévoilés comme les profiteurs de certaines restructurations, et des dirigeants de banques comme des joueurs de roulette avec l’argent qui leur est confié, la déstabilisation de la conjoncture ne doit pas étonner. Si elle vient de sonner l’alarme, c’est peut-être une chance pour réveiller ceux qui se seraient endormis sur le paillasson doré d’un bien être ni mérité, ni dû infiniment.
24/01/2008
Le Jeudi