Le temps des bilans
Pour 2007, ce sera celui de Luxembourg, capitale culturelle, de l’Europe, de la signature du traité de Lisbonne, de la charte des droits fondamentaux de 400 millions de citoyens européens, textes qui seront davantage un début que la clôture d’un exercice. Les bilans des entreprises juxtaposent les profits et les pertes.
En politique, un bilan en cache souvent un autre: réalisations s’évaluent en actions et en omissions! Souvent ces dernières pèsent lourd dans l’ensemble, comme par exemple les décisions qui se font attendre trop longtemps, les réformes retardées ou bien celles dénaturées de leur premier objectif.
L’Europe a évité de justesse une grave crise institutionnelle, la partie n’est pas encore gagnée, car les instances nationales devront ratifier les accords signés. Et un pays au moins fera un referendum, vu que les dispositions constitutionnelles obligent les Irlandais à passer aux urnes.
Depuis les « non » français et néerlandais, le vote populaire fait trembler les élus, la confiance ne règne plus. Cependant le bilan de l’Union Européenne est loin d’être négatif! Car en l’absence de grands problèmes résolus, les avancées faites dans des projets communs sont de taille! L’Europe se crée au jour le jour! Face à la globalisation, la démarche commune est essentielle pour résoudre les grands problèmes.
Quant au bilan, 50 ans de politique européenne ont été marqués par la plus longue période de paix dans l’histoire du continent. Bilan notable, sous-estimé par les Eurosceptiques, perçu comme allant de soi par les générations qui n’ont plus connu la guerre.
Et cependant le manque de confiance de nombreux citoyens européens prouve qu’il y a malaise.
Les Luxembourgeois qui, d’après le dernier Eurobaromètre sont largement favorables à l’Union Européenne seraient-ils mieux informés, plus sensibles à la question de la paix, seraient-ils peut-être mieux gouvernés par un chef qui milite depuis un quart de siècle pour la construction européenne? Toutefois le petit « oui » qu’ils ont donné lors du référendum sur le traité constitutionnel a laissé des séquelles. Il faudra mieux informer le parlement national, améliorer le dialogue entre les institutions, expliquer les politiques européennes au jour le jour, – faire comprendre que toute directive européenne est un compromis entre des intérêts, parfois divergents entre les secteurs économiques, ceux des consommateurs, et de l’environnement.
Pour évaluer à sa juste mesure le bilan des profits et pertes de la construction européenne, il faudra aussi considérer le degré de bien être des citoyens. Le grand marché unique ne créera pas l’enthousiasme, ni le sentiment de cohésion dont a besoin la société pour évoluer. Bien au contraire, l’esprit de concurrence ne converge pas au profit de l’Union de 27 Etats membres, face à des continents comme la Chine, l’Inde ou les Etats-Unis. Le simple constat que l’union fait la force ne fédère plus les nations, l’Européen lambda ne se retrouve pas encore dans les mécanismes compliqués de la gestion intergouvernementale. Et trop souvent encore c’est la faute à Bruxelles quand il y a problème….
Le traité reformé mérite aussi un autre discours qui, fort des expériences d’un demi-siècle, devra mettre au centre le respect de la dignité de la personne, tel qu’il a été formulé dans la charte des droits fondamentaux.
Et comme disait Jean Monnet, « ne pas coaliser des Etats, mais unir des hommes.