Devra-t-on bientôt s’excuser d’être vieux, malade et se voir refuser dès un certain âge tel traitement, comme c’est déjà le cas au Royaume-Uni et dans d’autres pays européens? La lutte contre l’acharnement thérapeutique traduit bien le souci de ne pas prolonger outre mesure l’usage de l’équipement technique, d’épargner au malade et à sa famille les longues attentes devant les écrans qui renseignent sur le fonctionnement – ou la défection – des organes du corps humain – jusqu’à mort s’en suive….
Quel est exactement le moment où le dernier voyage est entamé, le sait-on avec certitude?
Qui sait si, même en présence d’un soi-disant « testament », la décision n’aurait pas été différente à l’égard d’un traitement ultime, et ne s’agit-il pas aussi de la qualité réservée aux soins? Car dire adieu, attaché aux appareils dans la froide lueur de la salle de réanimation et le faire dans un entourage chaleureux, assisté de la compréhension de ceux qui n’ont pas la pression, ni les contraintes de l’horaire des professionnels de santé, c’est une différence fondamentale. Il y va de toute notre conception de l’accompagnement des malades!
Les progrès techniques risquent de faire de la médecine un travail à la chaîne, qui ne laisse plus le temps aux équipes médicales pour les échanges, si importants pour le mourant et sa famille.
Serait-ce que le temps y investi ne se calcule pas en chiffre d’affaire pour l’hôpital?
Déjà la pression se fait sentir pour des unités spéciales, les lits d’hôpitaux étant destinés aux malades avec des perspectives de guérison…
Les soins palliatifs en milieu hospitalier, serait-ce l’utopie des rêveurs, qui visent le progrès dans la qualité de la médecine?
Pour certains patients, le temps passé à l’unité de soins palliatifs a été la découverte d’un nouveau mode de vie. Sans pression de réussite, avec le seul bonheur d’être là, entourés de relations chaleureuses, jouissant de chaque jour pour avoir eu la chance de voir encore le soleil se lever.
Et de petits miracles défient le verdict médical, prolongent l’expectative de temps, donnent un sens à la vie en communauté, car désormais tout geste a une importance infinie. L’équipe des bénévoles, bien discrète dans le débat public, est là, aux petits soins. Un piano, installé comme par chance, suite à des circonstances extraordinaires, fait revivre la pianiste, qui avait décidé de céder au cancer, avant de rencontrer le médecin de l’unité des soins palliatifs de l’hôpital.
Concert pour les malades et leur famille, joie partagée, le courant qui passe couvre la tristesse et le désespoir.
L’essentiel seul compte, être là, entouré de chaleur et d’amour. Avant le grand départ. Utopie ou perspective?