Certes, les directives européennes ont influencé les politiques des Etats, mais toujours est-il que les réalisations sont encore loin, même si la loi impose l’égalité de traitement, les femmes gagnent moins. Même si elles ont accès à toutes les formations, elles sont présentes dans un nombre limité de profession – éducation, secrétariat, fonction publique, magistrature, profession de santé – absentes dans les domaines techniques, ingénieur, recherche, nouvelles technologies. Sans raison objective d’ailleurs, mais par habitude, par déviation aussi. En effet, la célébration d’une journée spécifiquement vouée à la réflexion sur des mécanismes du comportement de la société à l’égard des femmes relève beaucoup d’anomalies et de contradictions. L’image de la femme dans les médias et dans la pub, souvent critiquée pour dénigrement de la personne en est une, particulièrement flagrante.
Quant aux femmes elles-mêmes, elles continuent à se laisser diviser sur le sujet de l’éducation des enfants, sur le rôle de la mère, de la sensibilité féminine, apparemment plus apte à accomplir les tâches les plus ardues. Le féminisme ne les rallie pas toutes, loin de là. Celles, qui ont passé leur vie à être au service des autres – famille, œuvres sociales et autres services rendus – se sentent injustement dénigrées par celles qui, au vu des situations changées de l’éducation, de la maîtrise de la fécondité et des facilités de la vie moderne (lave-vaisselle, etc.), revendiquent une légitimité à une vie professionnelle active. Ce que la société a réussi à merveille, c’est de donner mauvaise conscience aux femmes. Elles sont nombreuses à se sentir sans cesse coupables. Ce mal-être les conduit souvent à des comportements d’extrême servilité, se sentant responsables de tout et voulant assumer toutes les tâches, alors que leur vie quotidienne devient une course contre la montre. Cette pression continue d’une opinion publique particulièrement dure à l’égard des femmes, leur fait perdre le bénéfice de toute cette liberté acquise, arrachée parfois à un environnement plein de préjugés… qui persistent d’ailleurs encore, malgré les droits acquis.
Si elles n’accèdent qu’à raison de 10% dans les organes décisionnels des entreprises, ce n’est pas parce qu’elles ne seraient pas capables d’y accéder, mais plutôt parce qu’elles ont été éliminées par la mauvaise conscience qu’on leur a faite… quand elles voulaient continuer leurs études, quand elles voulaient reprendre le travail après la naissance des enfants. Et quand elles voulaient se replacer après 15 ou 20 années de « service maternité » elles ont été jugées trop vieilles. Assez de lamentation sur la basse natalité, assez de complaintes sur le manque de crèches, voire sur les dommages subis par les enfants en garderie! Le manque de main d’œuvre autochtone est le résultat de l’élimination systématique de 50% des effectifs parce qu’ils sont féminins, et le faible taux de naissance, c’est bien la revanche des femmes pour l’absence d’infrastructures de garde.
Quand on ne cesse de leur répéter les nombreux problèmes que créera l’enfant à naître, c’est le rendre plutôt synonyme de handicap que de richesse et d’épanouissement. A force d’opérer par une attention spécifique, un traitement de faveur – mis à part la protection spécifique de la femme enceinte – n’ont-elles pas trop fait figure d’assistées, susceptibles de faiblesses multiples? Les femmes ont une endurance et des talents d’organisation multiples, des ressources parfois sous-estimées. Qu’elles s’engagent dans leur vie avec une saine estime de leurs atouts, sachant que la responsabilité est partagée et la liberté aussi.