La fête a été prestigieuse, un feu d’artifice de déclarations, réunions au sommet, bilans et perspectives… Déjà décrié comme un texte au plus petit dénominateur commun, la déclaration de Berlin était cependant innovante : pour la première fois les institutionnels ont accordé leurs violons!
Le Parlement représenté par son président sera-t-il satisfait? Car, Berlin devait être un nouveau départ, un signal de la relance, de la reprise des travaux, pour arriver à une entente sur l’avenir. C’était trop ambitieux, trop peu de considération pour l’état d’esprit de ceux qui ne fêtent pas 50 ans de paix et de développement économique, mais seulement l’an 3 de leur adhésion à l’Union, et pas même la deuxième décennie de leur libération de l’oppression totalitaire. Parler d’une voix est d’autant plus difficile qu’à force de nous féliciter de 50 ans de paix nous oublions que 12 pays membres ont fait un parcours différent. Pour eux la majeure partie de cette période était synonyme d’oppression et de misère.
Faut-il donc s’étonner de l’attitude de certains dirigeants, jouant des muscles et se distinguant par des discours antieuropéens? Est-ce dire que sans eux le progrès aurait été plus aisé, la déclaration plus musclée?
Or, ce 50ème anniversaire de la signature du traité de Rome nous a remis en mémoire les nombreux échecs et les attitudes surprenantes de routiniers de la politique. La chaise vide de la France, et le « I want my money back » des britanniques ont laissé leurs traces. De quoi donc accorder une trêve à ceux qui profitent de la tribune internationale pour dorer leur blason devant leurs électeurs… Phénomène intéressant, que l’écart entre certains discours anti-européen de chefs d’Etat et les sondages de leurs ressortissants! Il n’est d’endroit où la vanité se laisse mieux étudier que dans les rapports de presse des réunions au sommet. Il n’est pas du tout certain que le fait de rendre public les conseils des ministres créera plus de transparence, plus de véridicité, ou bien encore davantage de « langue de bois » et moins de convergence.
Ainsi, la chancelière a dû aboutir à un résultat qui pouvait faire l’unanimité, et elle a réussi la quadrature du cercle même si on s’imagine qu’elle-même aurait préféré un langage plus franc et des positions plus courageuses. Maintenant, la quinquagénaire devra trouver un nouveau souffle, une nouvelle justification, comme dit Gilbert Trausch dans son analyse historique.
Ne faudrait-il pas tenir compte du décalage du savoir, rafraîchir la mémoire de ceux qui ont déjà oublié l’après-guerre à l’est, voire apprendre cette histoire du 20e siècle aux jeunes qui n’ont pas vécu les séquelles d’une guerre, ni imaginé ce que veut dire l’absence de liberté?
L’Europe et son histoire fait partie de ce patrimoine spirituel et moral qui lie les peuples et qui sombre dans l’ignorance, voire dans l’indifférence. De là à la lâcheté, il n’y a qu’un pas. Et quoi de plus néfaste que suite à la méconnaissance des vrais problèmes, vus dans leur contexte historique, l’indifférence vis-à-vis de la construction et la pacification de l’Europe, gagne en terrain. Peut-être pour mieux masquer la lâcheté face aux exigences d’un monde plus juste et plus solidaire!