Non pas que le recteur n’ait pas les idées requises et l’engagement suffisant – bien au contraire. Son talent de communicateur lui vaut respect et, la confiance qu’on lui porte est totale.
Cependant, pourquoi n’arrive-t-on pas à sortir le projet de l’Université des querelles de clocher et de l’éternel débat sur les sites – qui est non seulement un mal luxembourgeois pour l’Université! (cf. route du Nord, cité judiciaire, lycées e.a.) sans parler de la crispation autour des CRP dont certains, plus que d’autres, se cantonnent dans leurs structures sans considérer le long terme et l’intérêt général de la recherche au Luxembourg.
Oubliées déjà les discussions du début, en 2000, lorsqu’il était question d’une structure indépendante du pouvoir public, ayant une large ouverture pour la recherche privée dans les entreprises!
Le premier groupe de travail sous la présidence de R. Downer, recteur à Limerick – autre université européenne créée de toute pièce sur une friche industrielle – avait proposé ce modèle – qui était la base du premier texte législatif. Les problèmes constitutionnels soulevés lors du vote du projet de loi par le Conseil d’Etat seraient à résoudre par l’ajout à l’article 23 de la constitution l’exception pour l’enseignement supérieur. Ceci mettrait le législateur en mesure de donner à l’Université l’envol et l’indépendance qui lui permettrait d’innover aussi dans le contexte de la recherche européenne.
C’est en effet devenu un mal européen, ce goût du contrôle, cette méfiance à l’égard de toute innovation. La recherche européenne s’apprête à se doter d’un nouveau programme cadre – le 7e. Avec la création du Conseil européen de la recherche, l’innovation est de taille, avec la dotation de cet organisme d’un milliard d’euros, la volonté d’en faire le fleuron de ce 7e programme cadre est documentée, les pistes sont tracées pour ceux qui veulent se joindre à cette entreprise commune. Uni.lu pourrait aussi y trouver sa chance, à condition toutefois que l’équipe dirigeante avec le recteur ait la liberté d’action nécessaire pour se joindre au souffle européen.
Quoi de plus triste que de voir compromise la chance unique pour notre pays de participer à cet envol. La recherche visée dans la stratégie d’augmenter la compétitivité de l’Europe devra être le moteur de la création de nouveaux produits, engendrer de nouveaux emplois.
Le Luxembourg s’est doté des instruments nécessaires, la recherche publique devra pouvoir jouer son rôle, être à «une ardeur d’avance» sur ses voisins, complémentaire à la recherche dans les entreprises. Encore que seulement une quinzaine de sociétés assure l’essentiel des activités de recherche et de développement au Luxembourg!
Et que font les autres? L’exemple de la Finlande devrait nous réveiller: le seul pays qui avait atteint les buts visés par la stratégie de Lisbonne en 2005 avait réussi grâce à la bonne coopération entre les PME et les Universités. Uni.lu n’a pas été le projet porté par les PME luxembourgeoises. Lors des débats sur le projet de loi de la création de l’Université, le plus grand souci au niveau des entreprises était le profil du futur ingénieur technicien!
Le gouvernement a fait du sien. En garantissant à l’Université un budget appréciable en des temps de pression pour les dépenses de l’état la volonté de continuer l’effort pour la recherche est évidente. Toutefois, si les « forces vives de la nation » ne perçoivent pas la chance qui leur est offerte, Uni.lu restera isolée du tissu économique – ce qui serait encore une occasion manquée pour la diversification de notre économie.