Il faudra donc se donner un système de lecture, car si c’est l’essentiel qui compte il faut encore le trouver. Rien de rébarbatif à lire le sommaire (Inhaltverzeichnis) qui énumère sur trois pages le contenu, on n’aura pas trop de mal à comprendre que la première partie résume :
– la définition et les objectifs de l’Union
– les droits fondamentaux et la citoyenneté de l’Union
– les compétences de l’Union
Les chapitres suivants traitent des institutions et de leur fonctionnement, avec tous les détails – rébarbatifs même aux initiés, mais nécessaires pour le bon fonctionnement futur du système.
Une vraie Constitution se serait limitée à l’essentiel. En croyant bien faire d’intégrer tous les textes de l’Union dans ce traité, on court le risque de détourner l’attention des citoyens vers des détails techniques dont il n’a pas les secrets. Imaginons que dans notre Constitution, soient intégrés le règlement de la Chambre des députés et le fonctionnement du Conseil d’Etat, du Médiateur, du Gouvernement, de la Banque centrale et de la Cour des Comptes, entre autres… Quel serait le citoyen qui pourrait affirmer être connaisseur de tous les détails de ces différentes institutions ?
N’exigeons donc pas de l’Europe qu’elle ne soit pas soumise à ce qui, au niveau national, donne lieu à autant de doutes et de questions, sans pour autant empêcher l’Etat de fonctionner.
Il importera donc que le citoyen responsable soit aussi averti de ce que cette constitution ne sera pas. Elle ne sera pas un carcan dont on ne pourrait pas se sortir, puisqu’elle est révisable exactement comme les précédents traités. Elle laisse aux Etats le droit d’initiative des politiques à mener. Elle n’est pas une menace pour les services publics : si la Constitution était en vigueur, la directive Bolkestein n’aurait pas pu inclure la privatisation de l’eau potable. Enfin, elle n’a rien à voir avec l’entrée de la Turquie dans l’Union : le « non » ne changera rien aux négociations sur la Turquie.
Les avantages par rapport aux traités en vigueur – et qui le resteront même si la Constitution n’est pas approuvée – sont de taille. Le nouveau traité accorde aux parlements nationaux la possibilité de contrôler les initiatives de l’Union, pour éviter les abus de pouvoir de « Bruxelles ». Avec la Constitution, la politique européenne sera donc davantage soumise à l’exercice démocratique du pouvoir.
La Charte des droits fondamentaux aura une valeur légale – tout citoyen pourra invoquer ses droits devant les tribunaux. Les travailleurs seront à l’abri des discriminations basées sur la nationalité. Les objectifs de l’Union comprendront la lutte contre l’exclusion sociale et l’égalité entre hommes et femmes.
La simplification des procédures sera un autre avantage notable. Les compétences du Parlement européen seront élargies, la sécurité sera un domaine de réelle coopération et la mise en place d’une agence européenne de l’armement permettra de relancer la politique de défense commune, un projet qui dès 1952 avait été approuvé par notre Parlement – mais refusé par l’assemblée nationale en France…
L’essai d’une lecture plus facile de textes issus d’un compromis entre 25 Etats européens se heurte toutefois à la difficulté d’être soit incomplet, soit ennuyeux. Le renvoi à la lecture du texte original de 12 pages relève de mon respect devant le citoyen – capable de discerner lui-même la valeur historique, même littéraire du préambule et des objectifs de l’Union. La campagne d’information entamée par le gouvernement permettra l’échange direct, et la réponse instantanée aux questions.
Si le dernier référendum questionnait les Luxembourgeois sur la loi muselière (Maulkorbgesetz) qu’ils rejetaient, ce référendum les questionne sur les principes d’une Union basée sur le respect de la personne et de sa dignité.
Qui sont ceux qui voudraient dire non à un tel projet ?