Les cris de scandale au sujet du dépassement du crédit pour la salle Philharmonique méritent quelques commentaires pour relativiser les faits. Car dans l’histoire des bâtiments publics, les dépassements des montants votés par la chambre des députés ne datent pas seulement de 1999 : tout au long des dernières décennies il y a eu des dépassements plus ou moins importants.
En voici quelques exemples, non exhaustifs mais éloquents ! En 1990 la restauration de l’ancienne prison des femmes pour le musée d’histoire naturelle a dépassé de 113% les crédits alloués par le Parlement. Et la liste peut être continuée : en 1991, dépassement de 11% pour le complexe sportif de l’Athénée, en 1997 dépassement de 51% des crédits pour le Lycée technique des Arts et Métiers, en 1998 46% pour le CNFPC d’Esch/Alzette, en 1999 136% pour la transformation de la Chambre des Députés. Depuis 1999 et la création de la Cour des Comptes, le Parlement doit autoriser tout dépassement par une nouvelle loi, alors qu’avant cette date, les adaptations étaient votées dans la loi budgétaire de décembre pour l’année suivante.
Le cri de scandale qui a accompagné la rallonge votée pour la salle philharmonique a encore dévoilé l’acharnement avec lequel sont accueillis les investissements pour la culture et en l’occurrence l’occasion était bien exploitée pour trouver la coupable. Si d’aucuns se sont plus à montrer du doigt l’ancienne ministre de la Culture et des Travaux Publics, comme si ces dépassements étaient une anomalie unique dans l’histoire des bâtiments publics, cela relève plutôt du mauvais genre politique que du souci de trouver des solutions au phénomène des dépassements de devis.
La question se pose de savoir si les nouvelles procédures mises en place avec la réforme de la Cour des comptes ont fait leurs preuves. Le contrôle financier, une nouvelle administration qui veille depuis 1999 sur l’exécution des bonnes procédures, n’a pas eu comme effet une maîtrise des dépenses, ni une réduction des coûts de construction.
En fin de compte la salle philharmonique coûtera 107 millions d’euros. Le même coût que le nouveau lycée à Pétange, le même ordre de grandeur que les lycées à Rédange et Lallange, moins d’un tiers du coût de la Cour de justice des Communautés européennes, 15% de plus que la Coque – mais moins, si on ajoute le coût de la piscine olympique, sujette à l’époque à des contestations véhémentes de la part de quelques députés.
En 2007 notre pays aura à nouveau le label de capitale européenne de la culture. Nous avons eu l’ambition d’y inclure la Grande Région. Avec raison, car si les villes de Trèves et de Sarrebruck hébergent théâtre, opéras, musées d’art moderne, et la ville de Metz la prestigieuse salle de l’Arsenal (fréquentée par de nombreux concitoyens) et bientôt l’annexe du centre Pompidou, nous devrions être fiers d’avoir comblé notre déficit en infrastructures culturelles depuis 1995.
En comparaison internationale le coût de la salle philharmonique n’est pas exagéré, par rapport aux salles de Rome (139 millions), Lucerne (143 million), et à l’opéra de Copenhague (337 millions). Son architecture en fera certainement une attraction, sa qualité un lieu de travail digne de notre Orchestre philharmonique, et un lieu de rencontre approprié pour les nombreux musiciens de notre pays.
A voir si lors de l’inauguration, le 26 juin, les contestataires seront absents, et si la coupable sera aussi… la responsable !